12/10/2005

La méthode globale, cette galeuse


Célestin Freinet a écrit (environ une décennie avant 1968 ):
« Au moment où tous les pays prennent conscience de la nécessité où ils se trouvent d’adapter leur système d’éducation aux besoins nouveaux de la Société, de la science et de ses techniques, une sorte de vent de réaction pédagogique semble souffler non seulement chez nous mais aussi internationalement. …
Une réprobation inconsidérée…
Le mécontentement naturel qui devrait s’attaquer aux causes de la crise scolaire et éducative : aux locaux inadaptés, à la surcharge de classes, au salaire insuffisant des maîtres, contrariant le recrutement, à l’aggravation des conditions de vie des enfants qui diminue leur capacité de jugement et d’attention, ce mécontentement a été fort habilement détourné sur les méthodes nouvelles et parmi celles-ci, sur la méthode globale, cette galeuse !
Nul ne la connaît puisqu’elle n’est employée telle quelle dans aucune école de France, qu’aucun manuel ne la recommande spécialement et que l’immense majorité des méthodes en usage font encore honneur au b a ba de notre enfance. On sait vaguement que la méthode globale est comme un symbole, celui de la non- obédience aux pratiques traditionnelles qui enseignent la lettre, la syllabe, le mot,et seulement après, la phrase…On a persuadé les parents qu’on ne peut apprendre à lire que si on connaît au préalable les syllabes et les mots ; que la méthode globale , en attaquant le problème par l’autre bout, fausse tous les mécanismes, ce qui nous vaut les pannes pour lesquelles on cherche en vain les remèdes.. .

Et … on cria HARO sur le Baudet !
Ce pelé, ce galeux d’où venait out le mal

Et Célestin continue d’expliquer :
« Essayons donc de faire le point :
le principe de la globalisation est indéniable et n’est d’ailleurs pas, dans la réalité une découverte récente.
mais le principe de globalisation n’est nullement exclusif de toute analyse ni d’une attention particulière aux éléments constructifs de l’ensemble. l’analyse ne saurait se suffire sans globalisation et inversement. Une bonne méthode doit faire fond en permanence sur les deux processus comme cela se produit dans toute acquisition vitale naturelle.
d’autant plus- et on l’a souvent négligé- que le fonctionnement de ces processus n’est pas exactement le même chez tous les individus et ne saurait être établi comme règle uniforme et obligatoire.
Il y a des individus qui sont portés vers une conception analytique particulièrement efficace et que troublerait un trop pressant appel du globalisme …ce sont en général des enfants amoureux du détail… qui distingueront avec maîtrise les composantes et qui seraient parfois tentés de négliger l’ensemble.
Et il y a au contraire des personnalités qui voient davantage les ensembles, qui sont globalistes nés et qu’on aura à ramener prudemment parfois à l’étude attentive des détails qui conditionnent les ensembles.
C’est pourquoi une bonne méthode…ne doit être ni exclusivement globale ni exclusivement analytique ; elle doit être vivante avec un recours harmonieux et balancé à toutes les possibilités que porte en lui l’enfant… »

Que dire après Célestin ? Sinon une fois encore :
L’école la vie … !